samedi 30 juillet 2016

Récréation et papillons (anabois 4)

Avec cet arbuste, nous sommes franchement hors des classifications que je suis dans le livre de Venet.
Le buddleia est un importé rapidement devenu envahisseur.
Il colonise et monopolise les friches urbaines et autres lieux zonards. Celui que je montre a été planté au tout début des années 80. Il accuse son age, mais j'ai bien souvent regardé ce tronc déformé, cicatrisé, colonisé de mousse.
A chaque fois, j'établissais un parallèle avec une oeuvre de Julie Gonce.
Aussi maintenant que son état a nécessité l' ablation de l'élément malade, j'en profite pour réaliser une photographie à laquelle j'ai rêvé bien souvent
ces dés sont des invités, un peu cinq rois mages de passage. On en parlera sans doute,
 mais beaucoup plus tard.


Ici, c'est du buddleia Buddleja davidii qu'il sera question :
parent des bignones (que nous rencontrerons peut-être) et curieusement des digitales (là, ça m'étonnerait), c'est une dicotylédone, qui a ici une durée de vie excédant 37 ans, mais il reste de l'espoir.
A force, cet arbuste à fait du bois, on va donc essayer d'esquisser une description
les cernes sont relativement bien identifiables, il y a une zone initiale poreuse avec des vaisseaux de plus gros calibre dont on distingue la lumière pour certains.
En bois final le tissu est plus fibreux (beige sombre) et les vaisseaux plus petits et enrobés de parenchyme paraissent d'abord en lignes tangentielles discontinue ensuite en arrangement plus ou moins radial dans les travées encadrées par les rayons ligneux de taille et de disposition assez uniforme.
Quand je dis que son état a nécessité l'ablation, je n'exagère pas. Pour preuve, le premier morceau que j'ai prélevé avait l'air correct. En réalité, seule la tranche que je considérais était intacte, j'ai eu des surprises au cours de la finition, ils étaient discrets les bougres
bon, j'ai pu isoler un morceau de tronçon indemne et c'est avec lui que j'ai tourné le dé présenté plus haut.

Mais nous n'allons pas rester sur ce divertissement .
La cloche sonne la fin de la récréation et c'est avec tout le sérieux requis que nous allons aborder un gros retour arrière :
Nous avons considéré l'aspect anatomique (visible par tout un chacun) des bois de la vaste famille des Rosacées. Pour mémoire et parce que ça me permet de faire ainsi le point :

prunellier

aubépine
cotonéaster
néflier
cognassier
poirier (domestique)

sorbier
pommier
amélanchier
merisier
prunier
amandier 
abricotier
laurier cerise


il en viendra sans doute d'autres et je ne sais pas encore de quelle façon je les inclurai dans la liste. On verra.
Sabine attend toujours un dé en fraisier... c'est une rosacée si si...
Mais cela me fait constater un oubli majeur : l'églantier, le rosier sauvage avec ses gratte-cul.
Une petite photo pour le fun, car ce dé à été tourné "pour en avoir un" et on ne peut pas dire que ses caractères soient tellement reconnaissables


après cet abus de fruits frais, et après la petite récréation offerte par l'arbre aux papillons, nous allons voir une famille moins populeuse. Du moins parlant de ce que je possède,  les Légumineuses essentiellement représentées sous nos climats par la sous famille des papilionidées (on les sentait venir à cause du buddleia)

A tout seigneur tout honneur, je commence par le robinier  Robinia pseudoacacia
avec des gros vaisseaux en zone initiale, des vaisseaux bouchés par des thylles.  Fins rayons ligneux donnant un petit maillage sombre sur fond clair en coupe radiale
Les vaisseaux vers le bois final sont arrangés de diverses façons, entourés de parenchyme qui paraît clair sur fond du tissu fibreux foncé (abondant)
Aubier et duramen distincts, ici la taille réduite du dé ne permet pas de juger plusieurs cernes
Densité élevée, je ne m'étendrai pas sur toutes les qualités de ce bois (durable, résistant, souple...un super bois mécanique, c'est d'ailleurs un grand bois d'arc)
Il doit contenir quelque chose d'abrasif car il est assez désaffûtant.

le cytise  Laburnum anagyroides
Zones initiales  bien distinctes mais en général moins larges que celles du robinier. Les pores ne sont pas systématiquement obturés par des thylles
Rayons ligneux fins, mais visibles à la loupe, d'épaisseur inégale ils semblent discontinus (Venet)
sur la photo, brun clair sur fond brun foncé des autres tissus (fibres ?) et on dirait que les vaisseaux sont groupés avec parenchyme péritrachéal et qu'en zone finale ils auraient tendance à dessiner des diagonales.
ce qui est confirmé par la lecture de la suite chez Venet : Pores de plus faible diamètre que chez le robinier groupés en "patte de chat" en alignements obliques, dendritiques ou tangentiels.
Tissu fibreux abondant.
Même densité que le robinier, mais ses propriétés mécaniques sont moindres
En tournage je le trouve plus agréable que le robinier.

le genêt ; ici, le genêt épineux  Genista scorpius
C'est le "bad boy" de la famille. C'est assez rare pour être noté, lui, je l'ai coupé sur pied... il nous embêtait, et quiconque s'est un jour trouvé piégé par ce genre d'individu me comprendra. En plus il a la malignité de s'associer à d'autres malfaiteurs comme la ronce et la salsepareille
Il n'est pas décrit quant à son bois, on va donc s'y essayer
Nombreux rayons ligneux très fins, mais on distingue aussi deux éléments de calibre plus important. Sont ce des plus gros rayons ou des rayons associés ?
Fins vaisseaux en petits groupes enrobés de parenchyme. alignés d'abord radialement pour ensuite constituer des bandes discontinues dans le sens tangentiel. Ces bandes séparées par des rideaux de tissu fibreux sombre.

Genêt à balais  Cytisus scoparius

Il n'est bien entendu repris dans aucun ouvrage quant à son bois. Cela a d'ailleurs été difficile de trouver une tige d'un calibre qui permet de tourner un dé hors cœur.
On peut distinguer une distribution assez originale des vaisseaux : très fins, non discernables (sur ma photo) ils semblent former une zone continue au départ du bois initial pour ensuite se grouper en îlots avec leur parenchyme pour former des figures diagonales parfois croisées ou en boucles. Ces figures noyées dans le tissu fibreux abondant paraissent traversées par les rayons ligneux relativement nombreux et d'épaisseur inégale.(tout ceci peut être rapproché de la description du bois de cytise)
Tout comme son cousin épineux, le bois de cœur se colore de sombre, mais sans suivre pour autant le dessin des cernes.

J'avais encore une essence sous la main, mais à l'examen, le tronçon en attente ne permettait pas de tourner un dé hors cœur.
Qu'à cela ne tienne, l'année dernière un petit décrochage de la glycine qui orne un coin de la maison m'avait amené à l’arrimer provisoirement. Comme tout provisoire bien réalisé, c'était en passe de rester du définitif... mais le fait que la prolifération de la végétation a rencontré le besoin en matière m'a conduit à dresser l'échelle et à jouer à l'élagueur.
Le soir même, j'ai préparé un cylindre au départ d'un tronçon de branche et le lendemain en jouant du four micro ondes j'ai accéléré le séchage. Je n'ai pas eu la bonne idée de peser l'échantillon au départ, il avait déjà un peu perdu le matin lorsque j'ai mesuré 22 grammes. Après trois passages de 45 secondes à 240° il était stabilisé à 19 grammes et j'ai tourné un dé en
glycine  Wisteria sinensis

ce n'est vraiment pas un bois utilisé, alors, pas de support livresque. 
Je devrai me borner à essayer de décrire la photo de détail prise immédiatement après la finition du dé
Ce qui m'a frappé en premier, ce sont les pores ouverts visibles à l’œil nu.
Les zones d'accroissement sont discernables, le bois initial a nettement une Zone Initiale Poreuse.
Les vaisseaux sont côte-à-côte sur la ligne de départ, leur lumière est importante comme chez le chêne ou le frêne et ils sont entourés de parenchyme.
Dans la zone finale on trouve beaucoup moins de vaisseaux et ils sont notablement plus étroits avec toujours leur enveloppe de parenchyme. En fin de cerne ils ont tendance à s'étaler tangentiellement.
Le tissu fibreux (beige plus foncé) est alors assez important.
Les rayons ligneux sont fins, régulièrement disposés et sont très légèrement flexueux
Les cernes annuels ne sont pas larges et ont tendance à se réduire les dernières années.
Un aléa s'est produit il y a deux ou trois ans sur une fraction du cambium et cela se manifeste par cette plage de tissu coloré au travers duquel on croit distinguer des trajets de rayons ligneux. L'activité normale ayant repris mais avec des vaisseaux à peine discernables dans leur plage parenchymateuse.

Voilà, c'est assez pour cette séance, il faut maintenant préparer la suivante.

anatomy of the wood 4
here, I talk about the buddleia the rose and then the Leguminosae family
with: black locust, laburnum, broom, genista and glycine

anatomía de la madera 4
aquí, hablo de la Buddleia la rosa y luego la familia de las leguminosas
con: robinia, lluvia de oro, aulaga, genista y glicina

lundi 25 juillet 2016

évolution révolution

si on respecte la signification des mots, il n'y a là qu'évolution.
Mais si pour cette évolution on touche au bien d'autrui... là il ne faudrait pas s'étonner de courir à la révolution.
Non, je ne m'énerve pas, j'explique aux gens...
Le but est fixé : il faut reproduire la vêture de la jeune femme à l'oeillet.
Les travaux sont entamés. Le tissu aussi et si on reprend les choses avec méthode, nous devons répondre à certaines questions
 - ubi ? à Bouvignes
 - cur ? on le sait, c'est un concours justement
 - quomodo ? c'est là qu'est la valse des hésitations, mais il en sortira bien une méthode finale
 - quando ? c'est pour le premier octobre
 - de quibus auxiliis ? et c'est là sans doute qu'est la probabilité d'une révolution (d'octobre ?)

Revenons quelque peu en arrière. Le travail jusqu'à ce jour s'orientait vers une robe construite d'une pièce. Le patron, les pièces découpées posées en éclaté sur la grande table, tout ça, c'est programmé dans ce but : faire une robe en un élément assemblage de toutes ces pièces.
Au cours du travail, des questionnements techniques ont fait surface, des problèmes de fermeture par exemple, il a bien fallu rejeter la tirette hérétique. Des solutions de rechange ont été trouvées. Rejetées ou modifiées... Les anneaux du BHV ont fait la place aux ganses cousues à l'arrière d'un passepoil.
Mais le passepoil était il connu à l'époque ? fichtre, il devait bien exister quelque chose dans le style !
Des essais ont été effectués sur modèle pour savoir si avec la disparition de l'ouverture de dos, la robe était passable. Je veux dire si la propriétaire pouvait se glisser dedans (et dehors aussi, ça va de soi) oui... parce que la fermeture entre temps avait émigré sur le côté. C'était vraisemblablement ainsi que se fermaient les vêtements à l'époque. Va savoir, les peintres n'ayant jamais fait de portrait de dos pour qu'on puisse vérifier...

Et voici qu'une nouvelle piste se présente : le vêtement en plusieurs pièces, une jupe, un haut et un genre caraco qui porterait le laçage décoratif de poitrine
Ce sera à suivre.

Mais ce n'est pas tout le passepoil à l’authenticité douteuse va faire place à une bordure en fourrure.
En imitation fourrure s'entend, c'est de fait ce qui semble être sur le tableau de Memling et pour réaliser cette fourrure Sabine fait la jonction entre la lucette qui lui donne le tressage en laine et... et...
c'est là précisément qu'est le nœud du problème, elle utilise la brosse du chat pour "carder" le galon


comment va t'il réagir ?
C'est ce que nous saurons en lisant le prochain épisode...
Mais parallèlement, il y a un hennin à faire. Du moins son squelette.
Nous avions pensé à du treillis, mais pas plus que la tirette, le treillis ne devait être disponible à l'époque.
Le plastique rigide non plus d'ailleurs...
Un peu de réflexion : si je vis en 1500 et que je dois faire un truc rigide, comment faire ?
La seule réponse qui me vient à l'esprit, c'est un entoilage empesé ;  empesé avec de la farine diluée ou du blanc d’œuf ou quelque chose comme ça.
Bon on va faire ainsi, mais en utilisant de la colle à bois diluée, sur un moule construit pour la circonstance, couvert de plastique pour éviter que ça colle sur lui on va monter la base du hennin bande après bande

samedi 23 juillet 2016

Anabois 3 : rosacées (suite)

nous allons continuer ce petit passage en revue de nos bois dans la foulée du Mooc
pour mémoire, ont déjà été présentés :
prunellier
aubépine
cotonéaster
néflier
poirier (domestique)

le sorbier (des oiseaux) Sorbus aucuparia


on peut se reporter à ce que Venet écrit au sujet des autres maloïdes
il a moins de rayons ligneux que ses cousins, présence de taches médullaires.  Et j'ai la chance d'en avoir une sur la petite surface du toit du dé
Je ne retrouvais pas cet exemplaire (sorbier), je l'ai ajoutée en complément après l'avoir heureusement retrouvé.

nous passons en suite au pommier  Malus domestica
ce dé a été tourné avec sa partie haute prise dans le cœur. L'arbre était âgé et les taches jaunes sont sans doute des débuts de dégradation. L'anneau de base est en aubier, ou du moins dans la partie du bois qui n'a pas encore modifié sa couleur
Bois homogène avec nombre de fins rayons ligneux (aspect hachuré) le bord externe de la zone finale souligné par quelques couches de fibres à paroi épaisse (Venet). Ces caractéristiques se retrouvent encore sur la photo de détail.
Une question que je me pose : est ce que les altérations jaunâtres ne se développeraient pas au dépens des endroits du cerne où il y avait un peu plus de vaisseaux, c'est à dire la partie initiale ?

La curiosité m'a poussé à le comparer avec son cousin qui pousse à l'état sauvage.
Je pensais naïvement que le pommier sauvage était le porte-greffe de nos pommiers de production. Et bien non, ces derniers sont des migrants venus de quelque part du côté de la Perse comme pas mal de fruitiers ; on leur a bien sûr travaillé le génome.
Le pommier sauvage Malus sylvestris est un autochtone.
J'ai trouvé un sujet qui pousse tant bien que mal entre la berge du canal abandonné de Vouziers et le lit de l'Aisne. On peut dire que même s'il n'a pas les pieds dans l'eau, il n'a guère de problèmes de ce côté.
Il s'est signalé par l'abondance de petites pommes tombées, je ne l'avais encore jamais remarqué.
C'est bien sûr un épineux mais pas trop agressif, les épines seraient plutôt des fines branchettes modifiées.
Nous n'avons pas emporté ses fruits tombés qui auraient certainement fait un excellent cotignac, nous étions déjà chargé de noix...
Et que dit son bois photographié dans les mêmes conditions ?
Les accroissements annuels se devinent par le changement de couleur : la zone terminale qui doit être riche en fibres contraste avec la zone initiale qui lui fait suite et qui contient des vaisseaux pas vraiment discernables si ce n'est par l'abondance de parenchyme para trachéal.
Les rayons ligneux sont nombreux, fins et très légèrement flexueux.

Au travail le bois dégage une légère odeur (pas vraiment agréable à mon jugement) typique du pommier. Il se tourne très agréablement et prend un beau poli.

j'ai aussi promis l'amélanchier  Amelanchier canadensis, le voici
comme je l'ai déjà remarqué, ce bois est très agréable à tourner. Moins dur que le cotonéaster, à un point tel (la dureté de ce dernier) que je me suis demandé si par hasard je ne confondrais pas avec un autre arbuste présent chez moi : le pyracantha hyper épineux ? Ma petite expérience m'a appris que plus ça pique, plus c'est dur
Voilà le détail d'une coupe d'amélanchier, on voit la parenté, mais en bois initial il y a une belle concentration de vaisseaux... ne devrait on pas le classer dans les "zone initiale semi-poreuse" comme les individus qui vont suivre ?
edit : en fait, regardant mieux cette photo, les vaisseaux ne sont pas nécessairement plus nombreux, c'est l'accompagnement de parenchyme qui donne cette illusion en opposition aux fibres nombreuses en bois final. A confirmer ou infirmer.

Toujours dans cette grande famille des Rosacées, mais avec une zone semi-poreuse au départ du bois initial on va retrouver les pruniers, les cerisiers et leur famille

Le merisier  Prunus avium, c'est un bois que j'ai utilisé pour des pièces un peu compliquées sur plusieurs axes (crabe, Clara, première Manta etc...)
Présence de zone initiale à forte concentration de vaisseaux, leur taille est identique à ceux de la zone finale. Rayons ligneux inégaux parfaitement visibles
En section radiale maillage visible à l’œil nu (Venet) c'est bien tout ça qu'on découvre sur la photo agrandie

et le prunier  Prunus domestica... ?
Ce que je trouve très beau chez le prunier, c'est sa couleur chaude, tirant sur le cramoisi chez le prunier à prunes jaunes et avec des nuances brun-vert chez le mirabellier (chez certains du moins)
zones d’accroissement sinueuses avec parfois des indentations sur plusieurs cernes consécutifs, dessine comme des faux rayons... difficile de voir tout ça sur ma photo, par contre sur une tranche plus importante c'est un peu ça
Pour ce qui est du plaisir à travailler ces bois, j'avancerais que les pommiers m'ont l'air plus "doux" que le copeau glisse plus. Tout en insistant sur le fait que merisier et prunier sont très agréables aussi et permettent le détail.
Un bémol pour le prunier : sa forte tendance aux fissures. Surtout ne pas chauffer au ponçage.

Maintenant... prunier, prunier, il aurait beaucoup à tourner pour en faire le tour... de tous les pruniers.
Ils se ressemblent certainement tous, mais j'ai pu remarquer des différences de ton dans le bois.
Surtout s'agissant du fruitier emblématique de la Lorraine.
c'est la raison pour laquelle je compléterai cet aperçu avec le mirabellier Prunus domestica subsp. syriaca


Dans mon sac, il reste un terrible lascar
l'amandier  amygdalus, le grand problème, c'est qu'on ne le rencontre pas dans ma région, trop de froid...
Zone initiale semi-poreuse restreinte, rayons ligneux parfaitement visibles à l’œil nu, flexueux, nombreux. Très belles mailles en section radiale. Duramen brun rouge vif.
Bois dur et lourd, plus lourd que le prunier. Se travaille un peu comme le prunier et prend un beau poli (Venet)
Une chose que j'ajoute, c'est la sensation huileuse de ce bois au toucher, la même que pour certains exotiques. Il est très agréable au tour.

J'allais écrire : Je ne peux pas parler du pêcher ni de l'abricotier, je n'en possède pas (encore)
Le premier serait à rapprocher du prunier et le second de l'amandier...
Bon, je suis sans pêcher (ça fait rigoler doucement Sabine) mais je me suis souvenu d'une petite bille d'abricotier. Je l'ai tirée de sa retraite et on va en parler

L'abricotier Prunus armeniaca
Venet en parle peu, seulement pour dire ce que j'ai résumé plus haut.
Et de fait l'abricotier a une zone semi-poreuse plus différenciée, il a aussi des rayons ligneux flexueux et nombreux la teinte dominante est ici le jaune
son bois est agréable à tourner, il se polit bien, il est moins lourd, moins dur que l'amandier mais il a l'air moins fendif.

Pour le bois suivant, je n'ai guère de renseignements. c'est le hasard qui me l'a fait rencontrer, rescapé d'un feu sauvage dans une carrière que nous visitions dans un tout autre but
une fourche avec un tronc de plus de dix centimètres de diamètre... nous étions à vélo mais j'avais emporté une nouvelle scie pliante japonaise dont j'ai pu mesurer l'efficacité.

le laurier cerise  Prunus laurocerasus


il n'a du laurier que le nom (usurpé).
Si, tout de même il a une toxicité un peu comparable à celle du laurier rose. Il se trouve placé au rang des envahisseurs indésirables mais on le retrouve en haie ou en massif dans beaucoup de propriétés...
J'avais déjà lu des choses au sujet de son bois fendif (c'est bien vrai) je l'ai trouvé dur, compact, mais qui résiste à une lame japonaise ? Pour ce qui est du caractère fendif, j'approuve mais j'ai sans doute été trop impatient. C'est en tout cas curieux l’occurrence d'une fente en pleine masse du bois, on reprendra l'ouvrage mais en attendant, on se contentera de celui ci. Il gardera la place édit : il a gardé la place jusque 20-08
Pour ce qui est de l'anatomie de son bois, rien. C'est une Rosacée, genre Prunus, on va donc essayer de le comparer avec ses cousins :
Les accroissements annuels sont devinables mais pas extrêmement nets
Ce qui rythme l'image, ce sont les rayons ligneux, les groupes de vaisseaux enrobés dans des plages de parenchyme disposés plus ou moins radialement et les cercles légers de tissu parenchymateux qui perturbent la lecture des limites de cernes.
Le tissu fibreux est assez abondant et peut-être contient il des vaisseaux très petits que je place à tort dans les plages de parenchyme.
Rayons ligneux fins, assez régulièrement disposés et semblant légèrement flexueux

Voilà, c'est une grande famille je veux dire par là qu'elle a beaucoup de représentants chez les tourneurs et que ces bois peuvent être  considérés comme des bois précieux. De notre point de vue.

Une dernière remarque avant de clôturer ce chapitre :
Sortant de ce cours sur l'anatomie du bois, je découvre et je parle surtout de cet aspect. Les renseignements complémentaires sur l'arbre et autres points de vue pourront se trouver facilement sur le web.
Une bonne adresse est http://www.wood-database.com/

un livre plus qu'intéressant à posséder est :
LE LIVRE DES ARBRES ARBUSTES & ARBRISSEAUX de Pierre Lieutaghi aux éditions ACTES SUD
on y trouvera tout autre renseignement tel l'usage pharmacologique, les anciens usages du bois etc...
Un autre livre très intéressant, c'est "Le Bois" de J Beauverie édité en 1905
je le possède, mais dans un état qui rend sa consultation délicate. Bonheur... ce livre est consultable auprès de Gallica. Il est même téléchargeable.

jeudi 21 juillet 2016

Anabois 2 : Suite pratique d'un MOOC

On l'a sans doute deviné en lisant Black & White
cette histoire de bois et de dés a une suite.
Il y a plus de vingt ans, le tout premier projet répondait à une accumulation, sans tenir compte des caractères des bois utilisés. Ce qui importait, c'était de constituer un échantillonnage. Bien vite pour rompre la monotonie j'avais changé l'orientation, j'avais utilisé des petits défauts, bref j'avais privilégié l'aspect artistique à la systématique.
Lorsque, à la fin de ce cours en ligne sur l'anatomie du bois, j'ai exhumé ces dés, j'ai constaté ce fait.
J'ai fait quelques brouillons de classement pour finir par décider de suivre le classement existant dans ce superbe ouvrage qu'est : Identification et classement des bois français de J. Venet.
L'édition date de 1987 et je crois que comme beaucoup d'autres choses le classement botanique est sujet à des modifications diversement justifiées. Je m'en tiendrai à celui ci.

Tout ne va pas venir d'un jet, c'est vaste et je dois tourner de nouveaux dés dans les essences oubliées et aussi pour remplacer ceux que je n'identifie pas ou qui ont été tournés un peu "poétiquement".
Très logiquement on va prendre la suite de Black & White où on est entré de plein pied dans les  Rosacées. Famille dans laquelle nous rencontrons les fruitiers de nos régions.
J'ai parlé du Prunellier, de son bois. Je l'ai situé parmi les pruniers (en gros) distincts des pommiers (en gros) mais pour être plus précis, les premiers ont un bois de printemps distinct (en principe) alors que les pommiers sont plus homogènes. On dira comme ça.

L'aubépine Crataegus monogyna
Cet arbre est classé avec les pommiers et pourtant sur l'échantillon, les accroissements sont bien nets
 - La zone initiale est parfois marquée par une ligne continue de vaisseaux tangents de même taille que ceux qui sont dispersés dans le cerne
 - Le bord externe de la zone finale est légèrement souligné par quelques couches de fibres à parois épaisses
 - La forme générale est parfois sinueuse (Crataegus) J.Venet.
c'est bien ça qu'on observe sur la photo du bas.
Ce bois est dur. Agréable au tour, il permet des détails. Malheureusement, il est appétissant pour les xylophages (et d'autres cousins le sont aussi, on en reparlera)


Le cotonéaster  Cotoneaster integerrimus (ou un cultivar) n'est pas présent dans le livre, et pour cause : ce n'est qu'un arbuste décoratif, un truc de jardinerie. Mais j'en ai dans mon jardin, et en semis naturel qui plus est. J'ai même utilisé un amalgame de racines dernièrement
J'en ai retrouvé un petit bout parmi mes ébauches, son nom était marqué et les vers l'ont épargné (ce qui n'était malheureusement pas le cas d'un amélanchier qui va suivre)
et, j'en ai tourné un dé
il répond bien aussi aux descriptions de J.Venet que je reprenais au sujet de l'aubépine
c'est un bois très, très dur mais qui se tourne admirablement. Il avait échappé à l'appétit des vers, sans doute était il quand même trop coriace... au choc il rendait un beau son clair.
Le bémol, c'est qu'on ne le trouve qu'en petites sections.


Le néflier  Mespilus germanica  lui est cité, mais en passant. Ce n'est pas un bois habituel de mes latitudes, il m' a été donné par madame Waffelaer.
Le cultivait elle en serre ? l'a t'elle ramené du Sud ? c'était seulement une branche qui ne m'a pas permis de travailler hors cœur
les portions qui restaient dans mes ébauches n'ont pas échappé aux gloutons... pourtant c'est le bois d'élection pour la fabrication du makhila.
Comme le dit J.Venet, la zone initiale est plus soulignée que chez ses cousins. Mais ma photo n'est pas de qualité.

edit :
Lorsque j'ai commencé cette petite synthèse des bois que j'ai rencontrés, j'avais inclus dans ma liste le cognassier.
Je pensais avoir dans le lot un dé en cognassier, mais à l'examen attentif, il s'est avéré que c'était un dé en néflier que j'avais déjà tourné. J'en avais donc tourné un second avec la branchette retrouvée.
Ne désirant pas faire de doublon, je n'en ai publié qu'un, mais j'ai du rayer de ma liste le cognassier. Pourtant, j'ai du cognassier qui pousse chez moi, donc, je comptais bien réparer ce manque à l'automne en nettoyant un peu le fouillis que ces arbustes créent.
 No need... Hier, Sabine m'a désigné un chicot qui subsistait d'un buisson que j'ai longtemps taillé avant qu'il ne soit submergé par, par ? je ne sais trop quoi dans la selva qui tente de nous étouffer (attention, je ne m'en plains pas trop)
... en conséquence, voilà :
le cognassier (du Japon) Chaenomeles japonica
je dois préciser parce que le cognassier normal ne pousse pas trop bien sous nos climats, mais je peux affirmer que le bois du japonica est très bien.
Les fruits aussi, j'en ai parlé dans une page sous le titre "au bon coing"
Mes maîtres en parlent peu :
Lieutaghi parle des fruits et au sujet du cousin le vrai cognassier (les bois se ressemblent) il dit seulement qu'il est lourd, dur et qu'il a servi à de menus ouvrages de tour. Il est aujourd'hui sans emploi (comme beaucoup d'autres)
Venet n'en dit mot
Beauverie  écrit en 1905 : COIGNASSIER COMMUN, Cydonia vulgaris, Gemeine Quitte, allem. ; the common Quince tree, angl.
Bois blanc, légèrement rougeâtre, d'un beau brun marron au cœur, taches médullaires interposées.
Densité élevée :1,062.
je tiens à citer encore Beauverie pour ce qui est des caractères communs des pommacées :
Ils sont durs, très homogènes,lourds, blancs ou rougeâtres, clairs, souvent flambés au cœur de rouge-brunâtre où brun-noirâtre, couleurs qu'il faut attribuer à un commencement d'altération. 
Aubier peu distinct, accroissements assez faciles à compter. 
Rayons égaux, nombreux, très minces; vaisseaux très fins, très nombreux; parfois un peu plus nombreux et gros vers le bois de printemps; au bord externe des accroissements se trouve une zone étroite où ils font défaut. Tissu fibreux homogène, très serré, à parois fortement épaissies,
avec un peu de parenchyme ligneux entremêlé, non visible à la loupe. [ p 855 du livre et 165 du pdf Gallica]

... me reste donc à courageusement parler du bois du dé que j'ai tourné
les rayons ligneux, visibles à l’œil nu ne sont pas si fins que ça, ils sont flexueux aussi mais cela est sans doute du à des modifications du tronc. Il y a sans doute eu frottements, blessure ? Conflit en tout cas car il ne s'agit pas d'un tronc mais d'une sorte de cépée et c'est le brin qui subsistait
Les modifications de couleur s’expliquent avec l'age, c'est une partie qui est ancienne
La photo n'est pas suffisamment claire pour parler des vaisseaux mais...ils ont l'ait très petits et diffusément répartis là où on peut les observer.
Tout ça respire le bois dense et dur.
Et de fait c'est ce qu'on ressent sous l'outil, c'est dur, mais gentiment dur, c'est agréable à tourner. 
Je suis cependant plus riche que je l'imagine... aussi j'édite cette section car (27 août)je viens de mettre la main sur un cylindre de cognassier auquel je fais confiance. Et pour cause, ce bois m'a été donné par Marguerite Verswijvel, elle et son mari étaient jardiniers dans un domaine de Dinant.
Voici cet exemplaire, ce n'est pas du cognassier du japon, c'est du cognassier Cydonia oblonga


pour rester dans le panier de fruits, j'ai retrouvé le poirier   Pyrus communis  un bois très estimé
celui ci a une tache (de parenchyme ?) à la limite d'un cerne. Ce doit être accidentel.
Vernet écrit : bois très homogène avec des fins vaisseaux... fins rayons ligneux donnant à la coupe transversale un aspect hachuré.
C'est bien ça

Un autre sujet (que j'aborde en suite du pommier sauvage),
c'est le poirier sauvage Pyrus pyraster,
celui que j'illustre pousse sur la bande calcaire de Calestienne et il a été vilainement mis à mal par le débroussaillage des bords de routes. J'en ai récupéré un peu.

Je souscrirais volontiers à l'ire de Lieutaghi lorsqu' il écrit :
Les méthodes agricoles modernes ne tolèrent pas la présence de ces gêneurs au milieu des champs ou des prés, et l'arasement progressif des  talus et des haies en maintes provinces porte un coup irrémédiable aux fruitiers à demi sauvages. Ce n'est jamais sans peine ni indignation que je vois de superbes poiriers déracinés par les machines attendant le pourrissement ou la tronçonneuse (ou pire encore la déchiqueteuse-broyeuse crachotant d'un côté ses copeaux et de l'autre son échappement huileux...)
Pour ce qui est du bois, il est terriblement proche du poirier domestique qui est illustré ci dessus.
Au sujet de ces bois, Mathieu écrivait (au XIX ème siècle déjà) :
Le bois du poirier a beaucoup d'analogie avec celui du pommier ; il est comme ce dernier, formé
d'accroissements irréguliers, peu circulaires et dépourvu de taches médullaires * ; il contient toutefois une plus grande proportion de tissu fibreux.
Il est très homogène, à fibres très fines, assez uniformément rouge, moins vivement coloré au cœur que le pommier. Il l'emporte en général sur ce dernier en compacité et en beauté, se travaille très aisément et dans toutes les directions, reçoit un beau poli.
Il pèse complètement desséché à l'air 0,707 à 0,839.

Après le buis et le sorbier domestique, le poirier fournit le bois le plus recherché pour la gravure sur bois. Il est employé avec avantage par les sculpteurs, tourneurs et ébénistes, par les fabricants d'instruments de musique, de mathématiques (règles, équerres). Il prend et conserve très bien la couleur noire et remplace souvent l'ébène.
Les fruits du poirier sauvage sont très acerbes ; on en fait une boisson alcoolique, le poiré qui a de l'analogie avec le cidre.
Beauverie reprend exactement ce jugement.
* de mon côté, je lui trouve pas mal de taches médullaires et ce serait même un caractère récurent. Le bois est clair fraichement exposé par l'outil, mais rapidement il fonce vers un brun rougeâtre chaud.


il en reste d'autres :
le cormier Sorbus domestica dont je ne possède encore aucun morceau. On en dit le plus grand bien,  le poirier en plus dur !
on verra...
édit : on va voir
Venet le reprend avec les autres "pommiers, poiriers etc..."
Je le cite :
Il existe entre ces bois d'incontestables similitudes
- Bois homogènes - la zone initiale est parfois marquée par une ligne continue de vaisseaux tangents, de même taille que ceux qui sont dispersés dans le reste du cerne.
Le bord externe de la zone initiale est légèrement souligné par quelques couches de fibres à parois épaisses

Rayons ligneux extrêmement fins, très difficiles à dénombrer, mais donnant à la section transversale un aspect strié

Tissu fibreux abondant formant parfois de petites plages tangentielles (en particulier chez Sorbus domestica)
Sorbus domestica : bois très lourd, duramen brun violacé, parfois clair, fonçant à l'air en s'oxydant, mailles plus foncées que le reste des tissus

Je confirme la grande dureté de ce bois (un peu comme le buis) très difficile à marquer au poinçon mais se tournant très bien.

Qu'écrit Lieutaghi à propos de ce bois ?
Le bois du cormier est l' un des plus remarquables de nos pays pour la dureté et l'homogénéité. Gris-brun à brun-rougeâtre assez foncé. Très compact, lourd (0.81 à 0.93 d'après Mathieu), il se coupe avec une parfaite netteté et prend un poli de marbre. Il résiste remarquablement bien aux frottements, à l'usure. Le cormier eut une grande importance aux temps où les machines artisanales et industrielles comportaient de nombreuses pièces en bois : vis (de pressoirs en particulier), dents d'engrenages, cames, glissières, poulies, navettes de cormier étaient les plus résistantes, les plus durables.
On en a fait des objets tournés très divers, des crosses de fusils, des manches de couteaux, des éléments de mécanisme de pianos. Les meilleurs patins de rabots et de varlopes sont en cormier.

Sans doute à compléter par Alisier torminal Sorbus torminalis ?

Je reprendrai la suite avec cette famille, je dois terminer un dé en amélanchier, un arbre qui n'est pas repris dans le livre, mais qui possède aussi un bois très dur qui se tourne agréablement
après lui, le sorbier des oiseleurs et le pommier on pourra continuer de voir les autres membres de la grande famille des Rosacées
et on retrouvera des pruniers. C'est un peu différent.

Following an online course on wood anatomy, I did explore a thimbles collection  I I did turn for twenty years.
some labels missing, I recognize some but for others ...
I decided to do a ranking here and I turn again those missing.
Extensive work.

A raíz de un curso en línea sobre anatomía de la madera, yo he explorado una colección de dedales he hecho  hacia  veinte años.
faltan algunas etiquetas, reconozco algunos, pero para otros ...
Me decidí a hacer una clasificación aquí y hare tornar los desaparecidos.
Mucho trabajo.